Les quatre cents coups, film autobiographique ?
Le sujet du film, celui d'un jeune garçon, mal aimé, qui choisit de fuguer plutôt que d'affronter ses parents et, de petites bêtises en gros mensonges, se retrouve dans un centre d'observation pour mineurs délinquants, est largement autobiographique. C’est Truffaut qui se raconte.
Le réalisateur a vécu ses années de jeunesse sous l'Occupation. De nombreuses similitudes unissent Antoine Doinel et le jeune François Truffaut.
Dans un dialogue avec la psychologue à la fin du film, Antoine Doinel en dit plus long sur son passé, face à la caméra.
Ce qu'il explique, c'est en fait la vie de François Truffaut.
Elevé par sa grand-mère, Doinel/Truffaut ne retourne vivre chez sa mère qu'à l'âge de huit ans, une mère remariée à un homme qui accepte l'enfant et lui donne son nom.
Les quatre cents coups, les vrais ceux-là, François Truffaut les fait avec son camarade de classe Robert Lachenay, une amitié qu'il recrée dans son film avec la complicité qui unit Antoine Doinel et son copain d'école buissonnière René.
Comme Doinel, Truffaut trouve refuge lors de ses jeunes années dans le cinéma et la littérature.
Comme Doinel, Truffaut sera enfermé.
Là où Antoine a inventé la mort de sa mère comme excuse à balancer au visage de son professeur inquisiteur, François avait prétexté l'arrestation par les allemands de son père.
Comme Antoine, Truffaut n’a pas connu son père biologique qui était dentiste.
Comme Antoine, Truffaut a voué une véritable passion pour Balzac qui fut l’un de ses écrivains préférés. Balzac sera d’ailleurs évoqué dans d’autres films de Truffaut, La peau douce, La sirène du Mississippi, Baisers volés et Les deux Anglaises et le Continent.
A travers Les quatre cents coups François Truffaut exorcise les douleurs de son enfance.
Pour autant, « si Les quatre cents coups était seulement un film autobiographique, aurait-il jamais atteint les foules des cinq continents, à travers des cultures et des sociétés dont les moeurs familiales sont parfois très éloignées de nous ? » (Jean Collet)
Truffaut dira : « Je crois qu'au départ, il y avait beaucoup de moi-même dans le personnage d'Antoine. Mais dès que Jean-Pierre Léaud est arrivé, sa personnalité qui était très forte m'a amené à modifier souvent le scénario. Je considère donc qu'Antoine est un personnage imaginaire qui emprunte un peu à nous deux ».
« On ne fait pas un film tout seul et si je n'avais voulu que mettre en images mon adolescence, je n'aurais pas demandé à Marcel Moussy de venir collaborer au scénario et de rédiger les dialogues. »
Le scénario est puisé dans l’adolescence de Truffaut. Son ami Robert Lachenay est mobilisé pour faire ressurgir les souvenirs. « Antoine, ce n’est pas Truffaut, c’est un amalgame des deux, il a un peu piqué sa jeunesse à son copain Lachenay. C’était plutôt Lachenay à l’époque qui était le moteur. Truffaut était un peu timide, il était tiré par Lachenay. » (Claude de Givray)
La part autobiographique du film n’a pas valu à Truffaut que des remerciements.
Ses relations avec son entourage familial ont été difficiles longtemps après la sortie du film.
Il se sentira même tenu de préciser que « si le jeune Antoine Doinel ressemble parfois à l’adolescent turbulent que je fus, ses parents ne ressemblent absolument pas aux miens qui furent excellents… »
La rupture avec ses parents va durer trois ans. Même après avoir renoué avec eux, il tiendra ses enfants à distance de leurs grands-parents. Ainsi, sa mère ne verra jamais ses petites-filles.
Truffaut confiera un jour à sa mère : « Je fais le métier qui me plaît, absolument, le seul possible pour moi, mais il ne me rend pas heureux. Je suis triste, maman, très souvent triste.»
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